Lancé avec éclat sous l’impulsion du président de la Transition, le projet Taxi Gab+ devait incarner la modernisation du transport urbain au Gabon tout en offrant une réponse concrète au chômage. Une vision ambitieuse, à la fois sociale, économique et citoyenne. Aux commandes : Curt Myricks Fouty Obeye, directeur général de Taxi Gab+. Mais à mesure que les réalités du terrain se dévoilent, une interrogation s’impose avec de plus en plus d’insistance : l’homme censé conduire ce projet n’en a-t-il pas perdu le volant ?
Un modèle séduisant, mais une mise en œuvre chaotique
Avec 800 véhicules mis en circulation et autant de chauffeurs recrutés, Taxi Gab+ devait être un modèle de réussite gabonaise : insertion professionnelle, entrepreneuriat individuel, service urbain modernisé. Sur le papier, tout y est. Mais dans les rues de Libreville, c’est un tout autre récit qui se dessine.
Curt Myricks Fouty Obeye le reconnaît lui-même : seulement 50 % des chauffeurs répondent aux exigences du projet. Les autres ? Une partie est en difficulté, mais près de 30 % sont qualifiés de “mauvaises graines”. Comportement irrespectueux, indiscipline chronique, sous-location illégale des véhicules, stationnements anarchiques devant les bars, voire trafic de stupéfiants : le projet présidentiel est parasité par des dérives graves, et son image fortement écornée.
Pire encore, Taxi Gab+ est aujourd’hui la société de transport la plus verbalisée pour mauvais stationnement dans le pays, preuve d’un profond malaise dans la gouvernance opérationnelle du projet.
Un dirigeant lucide… mais est-ce suffisant ?
Certes, Curt Myricks Fouty Obeye n’esquive pas la réalité. Il parle avec franchise, décrit les dysfonctionnements, dénonce les abus. Mais diriger un projet de cette envergure ne se limite pas à dresser des constats. Les Gabonais attendent des mesures concrètes, des solutions rapides, une restructuration efficace.
L’impression qui domine aujourd’hui est celle d’un pilote qui observe le tableau de bord s’allumer sans véritablement corriger la trajectoire. Où sont les sanctions immédiates ? Où sont les réformes dans le processus de sélection ? Où est la formation continue, la gestion des risques, la responsabilisation renforcée ?
Un potentiel intact, mais une urgence de réagir
Malgré ce bilan en demi-teinte, l’avenir de Taxi Gab+ n’est pas compromis. La deuxième phase du projet, avec 399 nouveaux véhicules et une extension nationale, ouvre une nouvelle page. Curt Myricks Fouty Obeye appelle à une plus grande participation féminine, saluant l’exemplarité des femmes déjà impliquées. Il insiste sur l’objectif de former de véritables entrepreneurs, pas de simples chauffeurs.
Mais le temps presse. Le projet Taxi Gab+ ne peut pas devenir le symbole d’un échec de gouvernance dans un secteur vital. Il mérite mieux. Le Gabon mérite mieux.
À Curt Myricks Fouty Obeye de reprendre véritablement le volant, avant que le projet ne s’écrase sous le poids de ses propres contradictions.