Le 22 juillet 2025 restera comme un tournant majeur dans la confrontation entre l’ancien régime Bongo et l’actuel pouvoir dirigé par le président Brice Clotaire Oligui Nguema. Mais alors que l’État gabonais lance une double offensive judiciaire, à Libreville comme à Paris, une question s’impose : Ali Bongo n’aurait-il pas eu intérêt à se taire ?
Par un dépôt simultané de plaintes contre Ali Bongo, son épouse Sylvia et leur fils Noureddin Bongo Valentin, le pouvoir de Libreville a enclenché une riposte d’une rare ampleur. À Libreville, les chefs d’accusation sont lourds : haute trahison, détournements massifs, corruption, falsification de la signature présidentielle. À Paris, la plainte transmise au Parquet national financier vise le trio pour blanchiment aggravé, recel et biens mal acquis.
Cette double action judiciaire s’inscrit dans une stratégie clairement assumée d’assainissement de l’espace public. Mais elle fait aussi écho à une réalité politique : les dernières sorties publiques d’Ali Bongo, jugées inopportunes et provocatrices, ont sans doute précipité cette réaction du pouvoir.
À Paris, le cabinet Vivien & Associés et l’avocat Sébastien Mabile mènent l’offensive. À Libreville, c’est Me Idriss Patience Moutombi, juriste proche de la présidence, qui orchestre les démarches. Tous avancent des preuves solides : comptes offshore, sociétés-écrans, transferts suspects sur plusieurs continents, pour un montant estimé à plus de 85 millions d’euros. Une architecture financière complexe, établie sous le règne Bongo, et aujourd’hui mise à nu.
Mais plus que le droit, c’est l’image d’un ancien président qui joue contre lui. En s’exposant médiatiquement après sa chute, Ali Bongo a sans doute réveillé des colères, stimulé des revanches et offert à ses adversaires politiques le prétexte idéal pour riposter. Le silence, parfois, protège mieux que la parole. Surtout quand elle semble défier une nouvelle ère qui veut rompre avec le passé.
Pour Oligui Nguema, » la fin de l’impunité ne se décrète pas, elle se construit « . Et cette construction passe aujourd’hui par les tribunaux. Une guerre judiciaire est ouverte, entre deux récits, deux visions, deux mondes. Le clan Bongo entend se défendre. Mais en sortant du silence, Ali Bongo a peut-être rouvert une boîte de Pandore qu’un repli discret aurait laissée fermée.
Reste désormais à la justice, au Gabon comme en France, de trancher.